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La cohabitation intergénérationnelle : la solution de l’avenir ?

 

Cohabitation intergénérationnelle
Espaces de vie dans lesquels des personnes de différentes générations se côtoient au quotidien sans nécessairement vivre en tout temps dans la même habitation.

Bien qu’elle comporte de nombreux bienfaits, la cohabitation intergénérationnelle demeure une pratique qui en est à ses balbutiements au Québec. Étant un outil incontestable pour rapprocher et décloisonner les générations, cette façon de vivre autrement soulève toujours des préjugés et bouscule nos habitudes expliquant peut-être, en partie, la lenteur de son émergence.
Mais avant de parler des effets indéniablement positifs et parfois invisibles de cette pratique porteuse, tentons, d’abord, de la définir.

Qu’est-ce que la cohabitation intergénérationnelle ?
Grâce à la créativité et à l’innovation de groupes d’ici et d’ailleurs, il nous est maintenant possible d’imaginer le vivre-ensemble à travers un spectre large de cohabitation. Garderies en CHSLD, cohabitat, écovillage, logements pour étudiants dans des résidences pour aînés, coopératives d’habitation… toutes des initiatives qui déstabilisent les façons traditionnelles de penser les relations intergénérationnelles et de répondre aux besoins de nos communautés. Les recettes de cohabitation sont variées, et les répercussions positives sont ainsi décuplées : prévention de l’isolement social, mutualisation du coût de la vie, sensibilisation à l’âgisme, création d’un filet de solidarité, maintien à domicile, accès au logement, etc.

Ce décloisonnement de l’habitation est nouveau et permet d’ouvrir les esprits sur d’autres manières de voir les liens intergénérationnels autrement que le cadre familial d’autrefois où les aînés de la famille vivaient avec leur descendance même, et qui a inspiré certaines familles modernes à opter pour une maison bigénérationnelle. Le concept que nous abordons aujourd’hui est donc beaucoup plus large que cette unique possibilité.

Une nouvelle manière d’habiter les espaces
Les ménages d’aujourd’hui se diversifient à grande vitesse, et la population est vieillissante, faisant naître de nouveaux besoins et aussi, par la bande, la nécessité de revoir nos modes de vie pour qu’ils soient sécuritaires, inclusifs, durables et accueillants pour toutes les générations, même celles à venir.

Afin de promouvoir la pluralité et la pertinence des différentes initiatives ayant lieu au Québec, Intergénérations Québec produit actuellement un livre sur le sujet. À travers les entrevues et la recherche préliminaire qui ont été réalisées à ce jour, nous avons pu découvrir des projets pionniers qui proposent une nouvelle manière d’habiter les espaces et qui donnent lieu à des récits touchants de solidarité et de mixité sociale.

Des écueils communs à tous les projets
Créés grâce à la résilience et à la persévérance de regroupements citoyens et communautaires, ces projets ont tous été confrontés à des écueils communs : craintes liées au partage du quotidien, complexité de la réglementation urbanistique et bureaucratique, enjeux de financement, conflits de gestion interne, réticences face au changement, etc. Ouvrir de nouvelles voies n’est pas toujours évident. Il va sans dire que plus il y aura de projets de ce genre qui verront le jour, plus ces enjeux seront amoindris par la sensibilisation qui s’ensuivra.

Les personnes interviewées dans ce livre invitent les actuels et futurs porteurs d’initiatives à recueillir des données et à s’inspirer de l’expérience vécue par d’autres projets ou d’autres familles, sans nécessairement faire un copier-coller de leur démarche. Bien analyser ses besoins initiaux, répertorier ses ressources disponibles et quérir celles qui manquent, lire sur le sujet, bien comprendre la réglementation et les rudiments de la gestion, suivre des formations, établir des codes de vie et des politiques d’encadrement… La liste de recommandations est longue, et avec raison ! Peu importe le type de cohabitation visée, sans une planification assidue en amont et une préparation individuelle à vivre en cohabitation, il y a peu de chance que le résultat soit concluant à long terme.

La plupart des projets l’ont nommé : il faut suffisamment « d’organisé » pour que « l’organique » puisse se créer dans la mixité sociale.

Avant de vivre ensemble, il faut d’abord se côtoyer un peu.

Vivre en communauté : un choix qui va croissant
Sur le plan individuel, décider de vivre en communauté intentionnelle ou avec ses proches est un choix de plus en plus répandu, mais qui soulève encore de la réticence. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit de partager son logis avec une tierce personne, par exemple. C’est ce qui est d’ailleurs vécu par les organismes québécois qui ont pour mission de jumeler des aînés seuls avec de jeunes étudiants au domicile même des aînés (citons ici Combo2générations). Bien que les avantages soient importants, les binômes, eux, sont peu nombreux. Apparemment, les demandes des jeunes sont beaucoup plus grandes que celles des plus âgés qui seraient, selon l’analyse de ces associations, plus réticents à ouvrir les portes de leur domicile. Faire connaître ces modèles et déconstruire les préjugés y étant liés sera nécessaire pour que ceux-ci soient aussi en vogue qu’en Europe. À titre d’exemple, le groupe 1toit2âges, à Bruxelles, a réalisé plus de 600 jumelages entre aînés et étudiants l’an dernier. Nous sommes loin de ce compte à Montréal !

Influencé par des décennies d’individualisme et de privatisation de nos espaces, il est normal d’expérimenter une transition dans cet apprentissage d’une nouvelle manière de vivre. Notre tissu social, notre ouverture à l’autre et notre vision de l’habitation doivent être revus et bonifiés. C’est pourquoi il est primordial que les citoyens s’acclimatent à l’idée de la cohabitation intergénérationnelle en participant par exemple à des activités communautaires ou en devenant bénévole, et ce, peu importe leur âge. Avant de vivre ensemble, il faut d’abord se côtoyer un peu. Créer des contextes de rapprochement variés sert bien entendu cette intention.

Au cours du projet de livre, il nous est apparu évident que ces changements de dogmes liés à l’habitation étaient inévitables, mais surtout extrêmement pertinents et positifs pour notre avenir. Nul doute que la cohabitation intergénérationnelle sous toutes ses formes, par sa nature transversale et ses nombreux bienfaits, saura répondre aux grands défis que nous traversons comme société comme la crise du logement, l’endettement, le vieillissement démographique, la perte de transmission et l’isolement social.

Développer le « réflexe intergénérationnel »
Nous avons tous et toutes un rôle à jouer pour que ces pratiques soient promues et deviennent pérennes. Comment ? En parlant de nos découvertes autour de nous pour éveiller les consciences, en devenant ambassadeur d’un projet auquel nous contribuons, en proposant des initiatives du genre dans notre milieu ou en soutenant celles en cours, en ouvrant nos maisons à ceux qui cherchent un logis, en répartissant solidairement les tâches qui remplissent nos quotidiens, en participant à l’allègement de certaines réglementations si nous jouons un rôle politique. Ainsi sera connue et reconnue la cohabitation intergénérationnelle.

L’heure est à l’union et à la solidarité pour braver les défis contemporains, pour soi, pour les autres et pour ceux et celles qui nous suivront. Et cette nécessaire révolution dans notre façon d’habiter les espaces demandera un grand sarclage de notre terreau relationnel pour qu’il soit enrichi et qu’un compagnonnage entre les âges soit possible. La cohabitation intergénérationnelle est un choix pour l’avenir.

Nous vous invitons à participer à ce mouvement d’innovation, à votre manière, en transmettant ce qui, à travers votre expérience, vous apparaît essentiel pour soutenir la grande toile humaine. Participez, vous aussi, à l’émergence du « réflexe intergénérationnel » !

Pour aller plus loin, quelques projets québécois inspirants :
Manoir Soleil de Chambly – garderie dans un CHSLD
Cohabitat Québec
Coopérative Notre-Dame-de-Fatima
Résidence des Marronniers de Trois-Rivières – logements d’étudiants en résidences pour aînés
Combo2générations – binôme d’étudiants et d’aînés à domicile

 

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