Hero

Sur les ailes du temps, de Pompéi à Roberval

L’automne dernier, pendant que nous cherchions par tous les moyens à éviter une rencontre avec le virus maudit ou, plus jouissivement, à contempler la chute d’un président psychopathe, des archéologues faisaient de nouvelles découvertes sur le site de Pompéi. En l’an 79 de notre ère, cette petite ville romaine sise au pied du Vésuve fut ensevelie sous les cendres et la lave du célèbre volcan et plongée dans l’oubli jusqu’au XVIIIe siècle. Depuis, à différentes époques et à des vitesses variables, les fouilles n’ont jamais cessé.

La vie s’étant brusquement arrêtée ce jour terrible de 79, les fouilles ont permis de retrouver intacts les immeubles ainsi que les corps des habitants surpris par le cataclysme. C’est ainsi que nous pouvons aujourd’hui admirer les constructions d’alors avec leur contenu dans une ville qui n’aura connu aucune modification depuis près de 2000 ans. Les objets de la vie courante, sûrement considérés comme banals à l’époque, deviennent, par le simple écoulement du temps et leur rareté, des chefs-d’œuvre que s’arrachent les musées.

Le temps peut transformer de vulgaires amphores en chefs-d’œuvre comme il a porté aux nues des compositions musicales considérées comme nulles ou inintéressantes au moment de leur création. Par analogie, le temps n’a-t-il pas le même effet sur chacune de nos vies ? L’autre jour, je racontais à mes enfants à quel point je m’efforçais jadis à ne jamais manquer un seul épisode du conte radiophonique quotidien pour enfants Yvan l’intrépide. C’était avant l’arrivée de la télévision, dont l’irruption a enseveli
ce genre d’émissions.

Avec le temps, avec l’âge, nous pouvons devenir des archéologues qui font découvrir aux nouvelles générations des vestiges dont ils n’ont aucune idée.

Nous sommes tous un peu des villes de Pompéi. Avec le temps, avec l’âge, nous pouvons devenir des archéologues qui font découvrir aux nouvelles générations des vestiges dont ils n’ont aucune idée. Plus nous entrons dans les détails de ce que nous avons vécu, plus leurs connaissances du passé s’enrichit. Plus que des données statistiques ne peuvent le faire, nous leur donnons accès à notre vision des choses passées, aux sentiments qui en émanaient et à nos illusions. Mes enfants ont ainsi appris que sur les ailes de l’hydravion d’Yvan l’intrépide, j’avais situé Roberval non seulement au bord d’un grand lac, mais juchée sur une très haute falaise. Un univers issu des ondes et de mon imagination, enfoui sous les alluvions du temps.

À lire aussi