Victoria Legault, directrice générale de l’organisme Aide aux Trans du Québec, s’est donné pour mission d’enrichir la compréhension des enjeux avec lesquels doivent composer les personnes trans. Pas étonnant qu’elle ait rapidement accepté de partager avec nous sa vision de la situation.

Victoria, à votre avis, comment le Québec se distingue-t-il des autres provinces canadiennes et autres pays en matière de prise en charge et de droits conférés aux personnes trans?

Le Québec s’est longtemps démarqué des autres provinces canadiennes en la matière. Antérieurement, le Québec a adopté des lois progressistes en matière de reconnaissance de l’identité de genre. En 2015, par exemple, le Code civil a été modifié pour permettre aux personnes trans de changer leur genre sur leur certificat de naissance sans avoir à subir une chirurgie d’affirmation de genre. Cette législation incluait également des protections contre la discrimination fondée sur l’identité de genre dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec.

Notre province se distingue également des autres par l’accès à des soins de santé spécialisés pour les personnes trans, notamment grâce à la clinique GRS Montréal accueillant des patients du monde entier. En outre, le Québec est riche en ressources communautaires dédiées aux personnes trans.

Cependant, le Québec n’est plus à l’avant-garde comme il l’a déjà été. D’autres provinces, comme le territoire du Yukon, ont adopté des politiques garantissant une meilleure prise en charge des personnes trans par le système de santé public.
De plus, en 2021, le dépôt du projet de loi numéro 2 modifiant certaines protections des droits des personnes trans a suscité une vive opposition au sein de la communauté trans. Il faut donc demeurer vigilants, bien que le gouvernement ait finalement reculé à cet effet. Comme le savent si bien les membres féministes de l’AREQ qui se sont battus pendant des décennies pour en arriver où nous en sommes aujourd’hui, aucun droit n’est pleinement acquis.

Comment peut-on encourager ce dialogue intergénérationnel ?

Pour encourager cet échange sur les enjeux des personnes trans, il est essentiel de créer des espaces où les différentes générations peuvent échanger ouvertement et respectueusement tout en gardant à l’esprit que, même au sein de la communauté trans, les perspectives varient selon les générations. Organiser des ateliers, des conférences ou des groupes de discussion intergénérationnels permet de partager des expériences tout en faisant de la sensibilisation.

Notre organisme accueille des personnes de tous âges, peu importe leur parcours de vie, ainsi que des alliés cherchant à mieux comprendre les réalités des personnes trans.

Concrètement, nous offrons des rencontres de soutien en ligne pour les personnes trans, non binaires ou en questionnement de 40 ans et plus. Dans les prochaines semaines, nous organiserons pour la première fois les « Rencontres Trans-Gen » en collaboration avec STUDIO ZX. Cette initiative contribuera à rassembler des membres de la communauté de tous âges afin de renforcer nos liens.

En terminant, que pourrait signifier la montée en popularité de gouvernements dits de droite eu égard aux personnes trans ?

La montée en popularité des gouvernements de droite peut exacerber les politiques et les discours hostiles envers les personnes trans et plus largement envers la communauté LGBTQI+. Ces gouvernements ont souvent montré peu de sensibilité aux préoccupations des personnes trans, adoptant des législations qui restreignent leurs droits, telles que des limitations sur les soins de santé ou les protections légales, tout en promouvant des valeurs conservatrices qui peuvent intensifier la stigmatisation et la discrimination.

Les discours négatifs de certains politiciens sur les enjeux trans dans les médias peuvent également diminuer le soutien public, ce qui est très préoccupant. Des politiques régressives ont déjà été mises en place dans plusieurs régions au cours de l’année écoulée, notamment dans certains États des États-Unis et au Royaume-Uni.