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Journée de concertation de la ministre responsable des Aînés – L’espoir d’un virage réussi en soutien à domicile s’effrite

La ministre responsable des Aînés, Sonia Bélanger, a travaillé au cours des derniers mois à la Politique nationale sur le soutien à domicile. Pour y arriver, elle est passée par plusieurs étapes, dont celle des consultations. L’AREQ a été invitée à y participer.
En attendant la conclusion des travaux, faisons un retour sur la plus importante consultation menée dans ce dossier, afin de garder en tête les impressions qui s’en sont suivies.

25 avril : journée déterminante ?
Le 25 avril dernier, l’AREQ (CSQ) a pris part à la Journée de concertation sur les soins et services de soutien à domicile. Présentée comme un moment crucial pour alimenter les travaux de la future Politique nationale sur le soutien à domicile, elle réunissait de nombreux acteurs du milieu : organismes communautaires, entreprises d’économie sociale, experts, syndicats, associations
et ministères.

Si l’intention de rassembler ces parties prenantes est à saluer, le déroulement de la journée a cependant soulevé d’importants questionnements. Plutôt que de favoriser une réelle concertation avec des échanges critiques, des débats d’idées et des forums participatifs, la journée s’est surtout articulée autour d’exposés magistraux. Peu d’occasions ont été données aux groupes présents de discuter des orientations, d’exprimer des désaccords ou même de confronter les modèles.

Or, une politique publique ne se bâtit pas uniquement à partir de constats partagés, mais aussi à travers des discussions franches. L’absence de ces débats fragilise l’objectif même de la journée : coconstruire une politique ambitieuse, cohérente et porteuse pour les prochaines décennies.

Confier une part toujours plus grande du soutien à domicile à des acteurs hors du réseau public peut entraîner une fragmentation de l’offre et, ultimement, une iniquité d’accès.

Une dérive vers la privatisation déguisée ?
Au-delà de la forme, le fond de certains messages livrés lors de cette journée soulève une autre inquiétude majeure : celle d’un virage progressif vers une privatisation des soins et services à domicile. Cette tendance se traduit par un recours croissant à l’économie sociale, aux entreprises privées et à la sous-traitance, au détriment du renforcement du réseau public.

Toutefois, confier une part toujours plus grande du soutien à domicile à des acteurs hors du réseau public peut entraîner une fragmentation de l’offre et, ultimement, une iniquité d’accès. Le soutien à domicile est un pilier du système de santé. Il ne peut être considéré comme un service périphérique.

Des propos troublants de la ministre sur la « surqualification » du personnel
L’une des déclarations les plus controversées de la ministre Bélanger concerne l’idée que le personnel du réseau public serait « trop qualifié » pour offrir certains services de soutien à domicile. Cette affirmation, largement médiatisée, a suscité une vive réaction.

Derrière cette formule se cache une logique de déqualification du travail qui s’inscrit dans une longue tradition de banalisation des métiers du soin, souvent occupés par des femmes. Comme l’ont souligné les chercheuses Anne Plourde et Louise Boivin dans une lettre ouverte publiée dans Le Devoir, cette vision contribue à renforcer les inégalités systémiques en sous-estimant la complexité du travail de soutien à domicile et les compétences humaines qu’il requiert.

L’alternative : un soutien à domicile public, universel et fort

Dans son mémoire déposé en marge des consultations, l’AREQ propose une vision claire : bâtir un soutien à domicile public, accessible, universel et de qualité. Cela implique notamment :

  • Un droit réel à recevoir des soins à domicile dans toutes les régions du Québec ;
  • Un financement stable et prévisible basé sur les besoins de la population et non sur la rentabilité des services ;
  • Une intégration des services au sein du réseau public pour assurer cohérence, continuité et équité ;
  • Une reconnaissance pleine et entière du rôle des proches aidants, avec des mesures concrètes de soutien.

Le vieillissement de la population n’est pas un problème : c’est un fait. Ce qui pose problème, c’est le manque de vision et d’investissement dans les bons leviers. Miser sur le soutien à domicile public, c’est reconnaître le droit de vieillir dans la dignité, chez soi, avec des services humains, compétents et respectueux.

Plus qu’une concertation, un vrai choix de société

Le Québec est à la croisée des chemins. La politique nationale sur le soutien à domicile doit être le fruit d’une réflexion honnête, structurée et démocratique. Le soutien à domicile est un maillon central du droit de vieillir dignement. C’est au nom de ses membres que l’AREQ continuera de le clamer haut et fort.

 

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